Réanimation Cardio-Pulmonaire : Les avancées de 2017

L’International Liaison Committee on Resuscitation (ILCOR) a fêté, en 2017, son 25ème anniversaire. C’est l’occasion pour J.P. Nolan, et al, dans un remarquable éditorial publié dans « Resuscitation »(1), de présenter les derniers acquis concernant la RCP.

Epidémiologie et survie
Il existe une relation significative entre le niveau socio-économique et l’implication des témoins, qui est plus effective en ville et dans les milieux non défavorisés (publication parisienne). Les canadiens notent que la mortalité des patients survivants après avoir été admis à l’hôpital, est de 20% à 3 ans. Une équipe danoise rapporte que 25% des patients défibrillés en préhospitalier, ne présentaient pourtant pas de rythme « chocable ». La conversion d’un rythme « non chocable » en un rythme « chocable » n’est pas rare et est suivie d’une survie à 30 jours plus élevée.

Organisation d’une réponse rapide
L’analyse de 29 publications permet de confirmer l’intérêt de l’organisation de systèmes d’intervention rapide. La mortalité à 30 jours reste cependant élevée (29%).

Premiers gestes de secours
La RCP assistée par téléphone et l’intérêt de pratiquer des compressions thoraciques seules a fait l’objet de recommandations 2017 de l’ILCOR.

RCP améliorée
Un travail danois a porté sur l’analyse des données des défibrillateurs automatisés. La rapidité de mise en fonction des appareils et l’analyse systématique post intervention, portant notamment sur la fréquence et la profondeur des compressions, jouent sur la survie initiale. La réduction des pauses est aussi essentielle.

Défibrillation
Un registre suédois rapporte l’analyse de près de 20 000 AC préhospitaliers. La survie à 30 jours paraît diminuer avec le nombre de chocs pratiqués. Un travail japonais confirme l’intérêt des ondes bi-phasiques. La pratique de deux chocs successifs paraît aussi prometteuse, d’après le « London Ambulance » (1/3 de RACS versus 7%).
La formation de la population à l’utilisation des DAE est confirmée comme essentielle. L’arrivée de drones porteurs de DAE paraît aussi prometteuse.

Secours avancé
Concernant la gestion des voies aériennes, 2017 apporte peu de nouveautés. La qualité de la formation des intervenants est plus importante que la méthode choisie. L’intubation trachéale en est le parfait exemple car elle ne semble pas améliorer la survie. Plusieurs travaux rapportent l’intérêt de l’utilisation de vidéo-laryngoscopes, dont l’utilisation se généralise. Si une intubation est réalisée, le rythme des insufflations sera de 10/min et les compressions seront pratiquées en continu. La capnographie permet de confirmer le bon positionnement d’une sonde trachéale. Il est précisé qu’une valeur d’EtCO2 >45 mmHg juste avant un choc est en relation avec un meilleur succès de celui-ci. Aucun choc n’est efficace en dessous de 7 mmHg.

En ce qui concerne les drogues :
Leur intérêt est mal documenté. L’amiodarone et la lidocaine permettraient un nombre plus élevé d’admissions à l’hôpital, mais n’influent pas plus la survie à long terme qu’un placebo !
La voie IO serait en relation avec moins de RASC que la voie IV, ce qui est surprenant. Le bicarbonate n’arrive pas à prouver son efficacité.

Les dispositifs mécaniques :
Très peu d’études. Un travail avec le LUCAS rapporte une survie similaire qu’avec des compressions manuelles, mais un devenir neurologique moins bon.

Circulation extra-corporelle (E-CPR) :
Là aussi peu d’études. Paris reste pionnière sur ce sujet, avec une organisation maîtrisée et des indications mieux précisées. La survie à 28 jours passe ainsi de 8% à 29%.

Echographie et RCP :
C’est une technique prometteuse, surtout pour prendre la décision, en l’absence de mouvement cardiaque, d’arrêt de la réanimation.

Réanimation pédiatrique :
Moins de 3% de RCP en service de néonatologie. L’injection de drogues avant la RCP est toujours péjorative. L’implication des premiers témoins, en cas d’arrêt extrahospitalier est là aussi essentielle. Un travail japonais met en doute l’intérêt de techniques avancées de gestion des voies aériennes. Un registre américain note même une survie meilleure avec masque facial et ballon qu’avec intubation trachéale ou supra-glottique.

Arrêt post traumatique et hypothermie
C’est surtout chez les noyés que des travaux sont retrouvés. Peu de rythmes « chocables » dans cette situation, mais une survie très directement reliée à l’implication des premiers témoins. Le « Trauma Audit and Research Network » anglais souligne l’intérêt du traitement précoce des causes réversibles.

Soins post-réanimation
Syndrome post arrêt cardiaque
Il peut se définir comme une réponse type inflammatoire requérant l’usage de vasopresseurs.
Contrôle thérapeutique de la température
Une température initiée à 33°C semble donner de meilleurs résultats que 36°C. Il est noté que 33% des équipes hospitalières européennes ont changé leur pratique pour traiter leurs patients comateux en post arrêt cardiaque et pratiquent désormais, une gestion contrôlée de la température.

Hémodynamique :
Une meilleure pression artérielle moyenne est associée à une meilleure survie neurologique.
Oxygène et CO2 post arrêt cardiaque
L’obtention d’une normocapnie améliore la survie. Si l’hyperoxie est délétère, l’hypoxie ne l’est pas moins.

Revascularisation coronaire :
Une méta-analyse précise que la réalisation précoce d’une angiographie est liée à une moindre mortalité à court et moyen terme.

Pronostic
Plusieurs articles sont parus en 2017 dans « Resuscitation » portant sur le pronostic des sujets comateux en post arrêt cardiaque. Après mise en place d’une hypothermie thérapeutique infructueuse, la décision d’arrêt de la réanimation interviendrait vers le 6ième jour, en moyenne. Plusieurs études observationnelles démontrent, contrairement à ce qui était supposé, que des convulsions ne sont pas incompatibles avec un bon pronostic. L’European Resuscitation Council recommande la réalisation précoce d’un CT scan cérébral pour les comateux n’ayant pas d’indication d’angiographie immédiate. L’intérêt de l’évaluation de l’oxygénation cérébrale par spectroscopie infrarouge (NIRS) n’est pas démontré.

Education
La formation aux gestes de secours auprès des jeunes générations est essentielle. De très courtes vidéos de 30 secondes à 2 minutes suffisent à améliorer la réalisation des compressions thoraciques (Enseigner la ventilation aux premiers témoins ne paraît pas souhaitable). Ces petits films pourraient être diffusés dans les salles d’attentes hospitalières.

(1). J.P. Nolan, J.P. Ornato, M.J.A. Parr, G.D. Perkins, J.Soar. Editorioal. j.resuscitation. 2018.01.023